Les petits pas de la PMA

Publié le par Max Lund

La circulaire rappelant les sanctions qu'encourent les gynécologues qui aident les Françaises ayant recours à la PMA à l'étranger sera bientôt abrogée. Une annonce encore loin de l'ouverture de la PMA à toutes les femmes, réclamée par les associations et promise par François Hollande en 2012. Il n’y a «aucune raison de compliquer la vie» des couples lesbiens, a jugé ce lundi sur Sud Radio Laurence Rossignol, ministre des Familles, de l’Enfance et des Droits des femmes. «Aucune raison», non plus, de «discriminer les couples homosexuels, les couples lesbiens […] en leur refusant l’accès à une technologie qui est ouverte aux couples hétérosexuels». Le gouvernement s’apprête-t-il à permettre, enfin, l’accès à la PMA aux couples lesbiens et aux femmes célibataires, comme le candidat Hollande s’y était engagé en 2012 ? Que nenni. Au lieu de cela, Laurence Rossignol a confirmé l’abrogation prochaine d’une circulaire rappelant les sanctions encourues par les gynécologues français qui orientent leurs patientes vers un pays étranger. Dans le viseur de la ministre : un texte, adressé en janvier 2013 aux gynécologues français, par la Direction générale de la santé (qui dépend du ministère de la Santé) et selon lequel un médecin français qui transmettrait à ses patients des informations sur la Procréation médicalement assistée (PMA) «même sans obtenir un paiement ou un avantage de la part de la clinique ou de l’organisme étranger, peut être poursuivi» et risque «cinq ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende». Révélée à l’époque par le Parisien, cette circulaire, envoyée en plein bouillonnement autour du mariage pour tous, avait suscité l’ire du Syndicat des gynécologues, obligeant la ministre des Droits des Femmes de l’époque et porte-parole du gouvernement, Najat Vallaud-Belkacem, à préciser que ce rappel à l’ordre visait en réalité les médecins acceptant une rémunération de cliniques étrangères en échange de l’envoi de patients, pratique «ultra-minoritaire» de l’aveu même de la ministre. Bertrand de Rochambeau, président du Syngof, précise d’ailleurs n’avoir eu vent d’aucune procédure engagée à l’égard d’un médecin pour ces motifs. La promesse d’abroger ce texte a d’abord été émise par François Hollande, jeudi dernier, au cours d’une rencontre avec trois associations de défense des droits LGBT (SOS Homophobie, l’Inter-LGBT, le Centre LGBT Ile-de-France). «Cette annonce est symbolique, mais pas suffisante», estime Virginie Combe, vice-présidente de SOS Homophobie, selon qui la circulaire visée «rendait certains gynécologues réticents à assurer le suivi de femmes ayant eu recours à la PMA à l’étranger, ce qui pouvait les mettre en danger. L’abroger permettra au moins de lever cette menace». François Hollande «a fait cette proposition à la demande des associations», a pour sa part assuré Laurence Rossignol ce lundi. Ce qui est certes exact, mais largement incomplet. Car leur revendication principale n’est autre que l’ouverture de la PMA à toutes les femmes, comme c’est le cas notamment en Belgique, au Danemark (pour les femmes mariées uniquement), en l’Espagne, en Finlande, aux Pays-Bas, au Royaume-Uni, en Suède et, depuis peu, au Portugal. Plusieurs militants ont dénoncé la «trahison» du gouvernement sur ce point au cours de la Marche des fiertés, samedi. Sur certains panneaux, on pouvait ainsi lire «Pour Mamans Amoureuses», «Promesse Mal Appliquée» ou encore «Parole Manquée Assez !». Pour l’heure, la PMA reste donc réservée aux couples hétérosexuels confrontés à des problèmes d’infertilité. Evaporée de la loi sur le mariage pour tous, reportée à une «loi famille» jetée aux oubliettes, puis renvoyée comme une patate chaude en 2013 au Comité consultatif national d’éthique (CCNE), la PMA pour toutes attend toujours que ce dernier se prononce. «Le gouvernement actuel, tétanisé par la Manif pour tous, ne bougera pas d’un iota», anticipe, pessimiste, Caroline Mecary, avocate au barreau de Paris et spécialiste des droits des homosexuels, pour qui «attendre les tergiversations du CCNE n’est qu’un prétexte pour ne pas prendre une position politique claire». Car d’autres instances ont émis des recommandations on ne peut plus explicites : le Haut conseil à l’Egalité, dénonçait ainsi en juillet dernier une «double discrimination», et le Défenseur des droits, la «méconnaissance du principe d’égalité» de la législation actuelle. Et ? Rien n’a bougé. «Il n’y a rien à attendre de cette fin de quinquennat sur ce dossier», souffle Virginie Combe de SOS Homophobie. Sauf, peut-être, que la France soit acculée par la Cour européenne des droits de l’homme, auprès de qui une requête a été déposée en mai 2015 par un couple de lesbiennes françaises contestant qu’on leur refuse l’accès à la PMA. Alors, peut-être, une femme pourra y recourir, «soit parce qu’elle ne peut pas avoir d’enfant, soit parce qu’elle ne souhaite pas avoir une relation avec un homme», dixit François Hollande, en février 2012.

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